Les années Boulez

Fondation Giacometti -  Les années Boulez

Organisée à l’occasion du quatre-vingt-dixième anniversaire de Pierre Boulez, cette exposition met en perspective la multiplicité des aspects de l’œuvre, de la pensée et des rencontres qui ont tissé son parcours. Le déroulement chronologique s’articule autour d’une sélection d’œuvres majeures du compositeur, en alternance avec les engagements qui ont façonné son itinéraire.

Les années d’après-guerre
Pierre Boulez entre au Conservatoire de Paris en 1943 puis, quelques semaines après la Libération de Paris, intègre la classe d’harmonie d’Olivier Messiaen où il découvre des œuvres majeures du XXe siècle, de Ravel et Debussy à Stravinski et Bartók puis suit en cours particuliers l’enseignement d’Andrée Vaurabourg et de René Leibowitz.
Durant ces années d’études, Pierre Boulez écrit les Notations pour piano, fréquente les galeries parisiennes, lit les journaux littéraires, découvre Kafka et Mallarmé. Parti rencontrer René Char en Provence, il découvre à Avignon l’œuvre de Paul Klee.

La Compagnie
Nommé directeur de la musique de scène de la Compagnie Renaud-Barrault, Pierre Boulez part en tournée avec la troupe et découvre l’Amérique du Sud en 1950, puis les États-Unis et le Canada. À New York, grâce à John Cage, il lit la poésie de Cummings, rencontre De Kooning, Guston, Pollock, Calder, Varèse et Stravinski.
À Paris, il fait la connaissance de nombreux intellectuels, galeristes, peintres et hommes de lettres, tels Nicolas de Staël, Henri Michaux ou Alberto Giacometti. À cette période se nouent également des dialogues amicaux serrés sur la composition avec Cage, Stockhausen, Berio, Maderna, Nono, Pousseur, Zimmermann – à Paris, à Darmstadt ou au festival de Donaueschingen.

Domaine musical
Nés sous l’aile bienveillante de Jean-Louis Barrault au cœur de l’hiver 1953-1954, les concerts du Petit Théâtre Marigny organisés par Pierre Boulez prennent dès leur deuxième saison le nom de Domaine musical.
Auditeur de ces premiers concerts, Nicolas de Staël consacre les dix derniers jours de sa vie à un immense tableau inachevé, Le Concert, directement inspiré des concerts Webern et Schönberg donnés les 5 et 6 mars 1955. Son décès tragique empêche Boulez de lui demander une maquette comme il le fera avec Masson, Ubac, Zao Wou-Ki, Miró et Giacometti, tout aussi fidèles auditeurs, qui œuvreront pour les emblématiques pochettes des disques Véga.

Direction d’orchestre
C’est à Caracas, en 1956, que Pierre Boulez dirige pour la première fois une grande formation symphonique.
Après la création du Visage nuptial, le Sacre du printemps pour le cinquantenaire de sa création puis Wozzeck de Berg, il dirige, à la toute fin des années 1960, les orchestres de Cleveland, Chicago, New York, et multiplie les contrats en Europe. En 1971, il succède à Leonard Bernstein comme directeur de l’Orchestre Philharmonique de New York et devient chef permanent de l’Orchestre symphonique de la BBC.
Ce travail avec de grandes formations marque l’œuvre de Boulez qui s’attèle à la réécriture orchestrale de partitions composées vingt ans auparavant et à la composition de grandes formes.

L’Opéra
Au milieu des années 1960, la critique des institutions et la nécessité de leur réforme conduisent Pierre Boulez à travailler avec Jean Vilar et Maurice Béjart à un projet de réforme de l’Opéra de Paris – abandonné par Vilar en 1968. Après Parsifal et Tristan, qu’il dirige en Allemagne et au Japon, la fin des années 1970 est marquée par ses collaborations avec Patrice Chéreau : la Tétralogie du centenaire, puis Lulu en 1979 à l’Opéra de Paris. Pierre Boulez dirige ensuite deux productions mises en scène par Peter Stein – Pelléas et Mélisande de Debussy et Moïse et Aaron de Schönberg –, ainsi qu’un triptyque Falla-Stravinski-Schönberg mis en scène par Klaus Michael Grüber, avant de retrouver Patrice Chéreau en 2007 pour De la maison des morts de Janáček.

Outils pour la création
Lorsque le Président Pompidou lui propose de concevoir puis de diriger un institut consacré à la recherche musicale, Pierre Boulez accepte et l’Ircam (Institut de Recherche et de Coordination Acoustique/ Musique) voit le jour en 1977. Mais l’« outil » ne se limite pas à la lutherie instrumentale : la salle de concert elle-même est un objet de transmission ouvert aux impératifs de la création. La constitution du répertoire passe aussi par la création d’un nouveau type de formation instrumentale : en 1976 naît l’Ensemble intercontemporain qui réunit 31 solistes de haut niveau. La transmission, enfin, est pensée à travers le dialogue avec les sciences, l’architecture, la philosophie. Pierre Boulez est nommé en 1976 au Collège de France.

Architectures virtuoses
Qu’il s’agisse de mettre sur pied un projet précis (l’Ircam, l’Opéra Bastille ou la Cité de la musique) ou d’échanger sur le processus de création, Pierre Boulez aura noué des dialogues privilégiés avec les architectes – parmi lesquels Renzo Piano, Christian de Portzamparc ou Frank Gehry – et garde un goût prononcé pour certaines réalisations plus anciennes, comme la spirale du musée Guggenheim de New York.
Pierre Boulez trouve ainsi dans l’architecture une source d’inspiration pratique, esthétique et politique nourrissant son goût pour les problèmes de virtuosité pure – ce « côté trapèze volant que prend une difficulté vaincue ». Dans Incises (1994) puis dans sur Incises (1996-1998), il donne libre cours à cette écriture virtuose.

Pour rechercher une œuvre consulter l’Alberto Giacometti Database