Fondation Giacometti

Diego, le frère d’Alberto, d'un an son cadet, a été l'un des principaux modèles de l'artiste, depuis ses premiers portraits. À la fin des années 20, il abandonne la carrière de peintre pour devenir décorateur, et surtout pour assister Alberto dans les aspects techniques de son travail. Il s'occupe de la préparation des armatures pour les sculptures, du moulage des plâtres et de la fusion des bronzes. À cause de sa disponibilité extraordinaire, due à sa présence constante dans l'atelier, Diego est un modèle idéal. Il pose pour son frère pour d'innombrables bustes, têtes, et peintures dès les années 20 et jusqu’aux années 60. Les traits de Diego sont si souvent copiés par Giacometti, qu'ils reviennent, presque de façon automatique, dans de nombreuses oeuvres que l'artiste réalise de mémoire.
Dans plusieurs tableaux des années cinquante, Diego est représenté assis dans l’atelier, entouré par le mobilier et les outils de travail, dans des tons encore assez lumineux. Ce tableau, en revanche, semble marquer plutôt un passage aux peintures plus tardives, à savoir les nombreux portraits en buste de front de Diego que Giacometti réalisa dans des tonalités gris foncé, qui font écho aux expressifs bustes sculptés de la même période. Au milieu de la toile, le visage émerge d'un fond obscur et indéfini, où l’atelier n'est plus du tout reconnaissable. Le travail du peintre se concentre sur la petite tête : tandis que le reste du buste se dilue presque dans le fond, c'est la tête la partie la plus travaillée, même si elle n'occupe qu'une petite portion de la toile. Proche, dans ce sens, des « têtes noires », réalisées dans les années 50 et début des années 60, ce tableau ne semble pas pourtant être peint de mémoire, ni pourrait être considéré simplement une étude de tête, étant donnée la ressemblance du modèle. Même si par peu de traits, la physionomie de Diego est ici facilement reconnaissable, notamment dans les volumes du front, du menton et du nez qui assument une évidence particulière : « Tant que le nez n’est pas juste - dit Giacometti à Yanaihara justement à la fin des années Cinquante - tout le reste est faux. Il faut d'abord peindre le but du nez pour peindre une tête ».
Signé et daté, ce tableau a été exposé en 1958 à la galerie Pierre Matisse de New York.

Signé et daté au pinceau en bas à droite « Alberto Giacometti 1958 »

Pierre Matisse Gallery
Collection particulière
Vente Christie's New York, NY, 4 mai 2005, lot n°36
Vente Sotheby's New York, NY (États-Unis), 3 novembre 2008, lot n°32

1958 Giacometti : Sculptures, Paintings, Drawings from 1956 to 1958, New York, NY (États-Unis), Pierre Matisse Gallery, du 6 au 31 mai 1958
2010 Crossing the Channel. Francis Bacon, Lucian Freud and Alberto Giacometti, Londres (Royaume-Uni), Gagosian Gallery, du 1er juin au 31 juillet 2010

Jacques DUPIN, Alberto Giacometti, Paris : Maeght éditeur, Paris, 1962, ill. p. 164
Yves BONNEFOY, Alberto Giacometti. Biographie d'une oeuvre, Paris : Flammarion, 1991, cat. n° 411, p. 426, ill. p. 429
Impressionist and Modern Art. Evening Sale, New York, NY : Christie's, 2005, lot n° 36, p. 126, ill. p. 127
Impressionist & Modern Art. Evening Sale, New York, NY : Sotheby's, 2008, lot n° 32, p. 122-123, ill. p. 123
Pilar ORDOVAS, Crossing the Channel. Friendship and Connections in Paris and London 1946-1965, New York, NY : Gagosian Gallery, 2010, p. 82 & 85, ill. p. 57 & 85
Yves BONNEFOY, Alberto Giacometti. Biographie d'une oeuvre, Paris : Flammarion, 2012, cat. n° 411, p. 426, ill. p. 429